Les premiers camps d’internement en France furent ouverts pour accueillir les réfugiés républicains espagnols en 1938. Puis, ils accueillirent les Allemands et Autrichiens anti-nazis ou juifs, réfugiés en France car, ils étaient considérés par les autorités françaises comme ressortissants d’un pays ennemi. Ils furent ensuite livrés aux autorités nazies à la suite de la défaite française de mai-juin 1940 par le gouvernement de Vichy. A partir du printemps 1941, ces camps d’internement accueillirent les premiers hommes juifs raflés à Paris. Jusqu’à la Libération, plus de 75 000 personnes, hommes, femmes et enfants, furent internés dans ces camps.
Les victimes de ces camps y ont été internés suite à des rafles majeures comme celles du Vélodrome d’Hiver (16-17 juillet 1942) et de Marseille (21 janvier 1943) ou à des arrestations individuelles.
Souvent, elles ont ensuite été déportées vers les Centres de mise à mort de Pologne. Dans la majorité de ces camps, les internés attendaient leur déportations sans travailler. La grande majorité des convois partis de France (77 convois) partirent de Drancy en Région Parisienne (67 convois), qui devint ainsi l’antichambre de la mort. Pithiviers, Beaune-la-Rolande ou encore Compiègne furent les principaux camps d’internement français.
L'exemple du camp de Drancy
Du camp d'internement au camp de transit
De la cité au camp d'internement Conçue en 1932, la Cité de la Muette est située dans la banlieue Est de Paris, à 4 kilomètres de la Capitale. Elle est encore inachevée lorsque la guerre commence. Occupée par les troupes allemandes en juin 1940, elle sert de camp d’internement pour des prisonniers de guerre et des civils étrangers. C’est sous leur impulsion que la Préfecture de police y crée le 20 août 1941 un camp d’internement destiné aux Juifs.
Les caractéristiques du camps Le camp est cerné d’une double rangée de barbelés séparés par un chemin de ronde, le tout précédé d’une cour intérieure en mâchefer. Une douzaine d’escaliers desservent les étages. Les W-C sont situés dans un bâtiment en briques plates et rouges qui ferme le fer à cheval. Hauts de quatre étages, les bâtiments entourent une cour d'environ 200 mètres de long et 40 mètres de large. Des miradors de surveillance se dressent aux quatre coins du camp.
Les conditions de vie dans le camp Couchés sur des planches ou à même le ciment, sans paillasse ni couverture, les Juifs internés sont parqués à 50 ou 60 par chambrée. Ils sont dépouillés de leurs papiers d’identité, de leurs cartes d’alimentation et de toute somme d’argent supérieure à 50 francs. Ils reçoivent chaque jour 250 grammes de pain et trois soupes sans légumes, bues dans des récipients de fortune qu’ils partagent à plusieurs. Toute la vie tourne autour de cette famine. Pour tout acte d’indiscipline, les internés sont condamnés à des jours de cachot après avoir eu la tête rasée.
L'antichambre de la déportation Le camp devient à partir de mars 1942, le camp de rassemblement et de transit en vue de la déportation de tous les Juifs de France : 63 convois, au total 65 000 personnes partiront vers les camps d’extermination, principalement vers le camp d’Auschwitz-Birkenau. Le camp est alors surpeuplé. À partir de juin-juillet 1943, un commando de S.S. autrichiens, avec à sa tête Aloïs Brunner, prend en charge l’administration du camp. Il met en place une administration violente et un renforcement de la discipline. Brunner fait tout ce qu’il peut pour rafler le plus grand nombre de Juifs, jusqu’à charger des internés de convaincre des Juifs de sortir de la clandestinité et de rejoindre Drancy, faute de quoi leur famille internée à Drancy sera déportée immédiatement.
Une tentative d'évasion réprimée Vers la mi-septembre 1943, des internés, membres du service d'ordre juif du camp qui possèdent les clés des caves, décident de creuser un tunnel destiné à l'évasion d'un grand nombre de Juifs. Lorsqu'il est découvert le 09/11/1943 par les S.D. des S.S., le tunnel mesurait 38,50 mètres de long et devait aboutir 1,50 m plus loin. Les Allemands trouvent sur place le vêtement de travail d'Henri Schwartz. Il est torturé et livre 13 noms. Ces 14 internés reçurent l'ordre de murer l'entrée du tunnel. Puis, ils sont déportés à Auschwitz. Une partie d'entre eux réussiront à s'évader sur le trajet, tandis que l'autre finira gazée.
Témoignage du Professeur Georges Wellers
"Dans la 2e moitié d'août, on amena à Drancy 4000 enfants sans parents, âgés de 2 à 12 ans. On les déchargea des autobus au milieu de la cour, comme de petites bestioles. La plupart ne savaient pas où étaient leurs bagages difficiles à reconnaître, et pendant longtemps des enfants de quatre, cinq, six ans se promenaient parmi eux, croyant à chaque instant retrouver le leur. Les enfants se trouvaient par 100 dans les chambrées. C'était l'époque de la soupe aux choux à Drancy. Tous les enfants souffrirent d'une terrible diarrhée. Ils salissaient leurs vêtements et les matelas sur lesquels ils passaient jour et nuit. Chaque nuit on entendait sans interruption les pleurs des enfants désespérés, et, de temps en temps des cris aigus des enfants qui ne se possédaient plus. La veille de leur déportation les enfants passèrent à la fouille, comme tout le monde. Les garçons et les fillettes de deux ou trois ans, entraient avec leur petit paquet ou les inspecteurs de la "Police aux Questions Juives" fouillaient les bagages. Les petites broches, les boucles d'oreilles les petits bracelets des fillettes étaient confisqués par les PQJ."